Vous trouverez sur ce blog, au fil des jours et des mois, les oeuvres réalisées par le Maitre Calligraphe Shi Bo, ainsi que les stages qu'il propose, ses livres numérotés et autres parutions, ses commentaires ....... Que la visite vous soit un enrichissement.
L'administratrice : Sérénité'art

jeudi 30 mai 2019

BREF APERÇU DES POÈMES CONTEMPLATIFS - --略谈瞑诗

Depuis un moment, sur ce blog, je parle  de 
shanshuishi 
 山水诗 
et de shanshuihua.
 山水画

De nombreux amis-lecteurs me demandent plus de renseignements sur shanshuishi  ( les poèmes contemplatifs ).
C’est un sujet très ample, et je me dois de développer autant que je peux ce sujet intéressant. 

D’abord, il faut dire que shanshuishi est né dans la recherche du "silence de l’âme " entreprise par les anciens ermites taoïstes et par certains lettrés reclus. 

Ces derniers, désirant se couper du monde, allèrent s’installer au fin fond des montagnes, au bord d’un cours d’eau isolé ou bien dans une grotte abandonnée. Quand ils faisaient face à de tels paysages silencieux et déserts, ils s’enivraient facilement de la sérénité offerte par de si beaux paysages pittoresques et idylliques, L’émotion poétique montait naturellement dans leur esprit et ainsi naquit la poésie shanshuishi.

Tao Yuanming, Wang Wei, Li Bai et Su Dongpo sont les plus grands ténors de cette poésie. La traduction française de leurs shanshuishi  est abondante, on a l’embarras du choix.

Cette poésie a une autre appellation littéraire : 
( 瞑诗 )
mingshi 
Ming   :
à ne pas confondre avec un autre ming qui veut dire crépusculesignifie fermer longtemps les yeux. En général lorsqu’on pratique la méditation pour plonger profondément dans le repli sur soi et pour effleurer le délice de la non-existence, les yeux sont toujours bien fermés, et pendant longtemps.

Mingshi a la vertu d’aider à entrer dans la méditation profonde car cette poésie offre souvent un très beau paysage silencieux propice au voyage mental et à l’enivrement du silence conduisant à l’oubli de soi-même.

Dans les annales de la poésie mingshi, brillent de nombreux poètes très connus, tels que Han Shan, Wang Wei, dont les œuvres sont abondamment traduites en français. 


Pour offrir aux lecteurs avisés de nouveaux visages de mingshi, j’ai choisi et traduit dix autres auteurs peu connus en France mais très importants et connus en Chine. 
J’ai réuni ces traductions françaises dans des cahiers traditionnels chinois sous le titre « Dix poèmes contemplatifs », espérant que mes amis-lecteurs admirent et goûtent les profonds délices de ce genre de poésies. 




Plusieurs d’entre eux  m’ont déjà manifesté leur intérêt pour ce recueil.

lundi 20 mai 2019

DIALOGUE CALLIGRAPHIQUE - 4. (SUITE ET FIN)

关于个人书体的对话
--A propos du style personnel suite et fin.

ALAIN PANSÈS - CHEMINS CALLIGRAPHIQUES P 88




S. B : J’ai des élèves très anciens, mon ami Alain P. a commencé son premier cours avec moi le 30 novembre 2002. Il a suivi tous les cursus que je lui ai préparés, il continue maintenant à venir suivre mes cours une fois par mois. Je lui ai conseillé en 2015 de copier Wang Xizhi, Zhao Mengfu, Shen Guoding 沈国定, etc. Il a consciencieusement suivi ma recommandation, il a même fait un dictionnaire de Wang Xizhi, il est prêt à faire un dictionnaire de mon style. Je pense qu’il est prêt à fusionner tous les éléments esthétiques appris depuis tant d’années pour forger son style.

Mon autre élève Elisabeth B. a commencé son premier cours avec moi le 16 septembre 2003. Elle a suivi un cours par semaine depuis cette date jusqu’à maintenant. De plus elle a fait trois années d’étude de la langue chinoise à l’INALCO et fréquente le Centre culturel chinois à Paris pour apprendre la peinture chinoise depuis une dizaine d’années. Toute cette étude de la culture chinoise l’aide à maîtriser très bien le pinceau. En 2016 nous avons fait un très beau livre sous le titre de « Passion à l’encre » bien apprécié de nos lecteurs. Malgré ses succès, Elisabeth ne m’a jamais parlé de créer son style, je ne sais pas ce qu’elle pense là- dessus.
ELISABETH BOURGEAS - CHEMINS CALLIGRAPHIQUE P 15

J’ai encore une autre élève très douée en art et bien appliquée à la calligraphie, elle vit à Digne Les Bains, c’est mon amie Corinne L, artiste de profession. Notre premier cours a eu lieu le 3 novembre 2007. Depuis plus de douze ans, elle vient une fois par mois pour travailler avec moi pendant quatre jours de suite. Son assiduité constante et sa facilité dans le maniement du pinceau méritent toujours mon admiration. Actuellement elle est au dernier cursus « herbe folle galopante », bientôt je pourrai lui proposer de copier d’autres grands maîtres historiques avant de créer son style propre

Madame Catherine B-Desbois fait partie de ce cortège de mes anciens élèves. Nous avons commencé notre parcours le 27 mai 2008, elle continue à venir à mes côtés une fois par mois pour calligraphier des vers qu’elle trouve dans des livres. Très appliquée dans le pinceau et dans l’encre, elle ne m’a pourtant jamais parlé de la création de son propre style.
CATHERINE B-DESBOIS - CHEMINS CALLIGRAPHIQUES P 27

Jean-Paul H de Roanne est aussi mon élève ami, très constant et consciencieux. Animé par son immense plaisir pour la culture chinoise, il a commencé les cours à mes côtés le 22 février 2007. Déjà douze ans que nos pinceaux dansent agréablement ensemble. Il anime à Roanne une association d’amateurs fervents pour la culture chinoise, ce qui nourrit toujours mon admiration. Mais à ce que je sache, Jean-Paul n’a pas non plus l’idée de créer son style personnel de calligraphie.
J’ai encore une série d’anciens élèves, tels que Xavier D, Khievchou T, Chantal D’E, Inès U, Muriel D, Edwige S etc. qui méritent d’être présentés ici. Mais ce sera peut-être pour une autre occasion. D’ores et déjà, je peux dire que j’ai un grand plaisir à travailler avec eux.

M.S-G : Je me posais la question : ton style est unique. Il nécessite donc un dictionnaire unique si on veut le respecter. Penses-tu en réaliser un ? du moins sur les caractères usités à l'époque Han ? Si tu n'en fais pas, ton style disparaitra après toi, sauf sur les calligraphies que tu as faites……

S. B : Je n’ai pas envie de faire un dictionnaire des caractères calligraphiés dans mon style. Je ne pense pas que ça vaille le coup. D’ailleurs, ne t’inquiète pas pour cela.
D’abord j’ai déjà laissé plusieurs ouvrages de calligraphie à l’Académie nationale et à l’Académie municipale pékinoise des peintres-calligraphes, tels que « Dao De Jing »道德經 ; « Trente six Stratagèmes chinois »三十六 et récemment « Préface au Pavillon des orchidées » 蘭亭序.

Ensuite j’ai horreur de courir après la renommée ou la célébrité.
Enfin en France durant ces vingt dernières années, j’ai laissé suffisamment de traces calligraphiques à mes élèves. Le cursus du kaishu est composé de 60 unités, chaque unité comprend 6 caractères, cela fait en tout 360 caractères ; le cursus du xingshu contient 50 unités, chaque unité présente 12 mots, ça fait en tout 600 mots. Mes élèves gardent dans leurs archives mes modèles de ces 960 mots, ils possèdent chacun un dictionnaire de mes tracés calligraphiques. J’en suis bien content.

M S-G : Comment trouver "mon style personnel" alors que je ne connais pas les règles de simplification des traits...... cela ne commence-t-il pas par là ? Le chinois de Chine, lorsqu'il écrit au quotidien, les applique bien que ce ne soit pas de la calligraphie......mais je suppose qu'il les apprend et ces règles sont-elles les mêmes que celles appliquées à la calligraphie ? Ou s'il faut les apprendre, mot par mot, comme on apprend le tracé du Kaishu ?

SHI BO - CHEMINS CALLIGRAPHIQUES.

S. B : Les règles des tracés ? Oui, certainement ! C’est justement ce que je ne me lasse pas d’expliquer en cours à mes élèves : axe du mot, symétrie des traits, harmonie entre le blanc du papier et le noir des traits (harmonie entre le vide et le plein), respiration du pinceau, équilibre du tableau dans son ensemble...
Tu as travaillé toute ta vie dans l’esthétique et la beauté, tu maîtrises bien les principes d’art susmentionnés. Et surtout tu es très active et créatrice, tu pourras forger ton style calligraphique. Je te souhaite bon vent !

mercredi 8 mai 2019

DIALOGUES CALLIGRAPHIQUES - 4

关于个人体的对话
--A propos du style personnel

Martine Sbolgi-Guinet :"Tout en pratiquant mes exercices calligraphiques, je pense à toi et je me suis dit que ce serait intéressant pour tes lecteurs de découvrir comment tu étais passé de l'enseignement de ton Maitre à la création de ton propre style……

Shi Bo : Tu parles du style calligraphique personnel, c’est un vaste sujet à explorer. Mais je pourrais déjà te dire avant de commencer notre conversation que le style personnel est au fond l’expression du sentiment et du tempérament personnels par le truchement du pinceau…
Le style "Bambou gracieux"

M. S-G : Comme chacun sait, il n'y a pas de rapport entre l'écriture "ordinaire" de "tous les jours" et l'écriture calligraphique......Est -ce ton Maître qui t'y a amené ?

S. B : En effet, l’écriture quotidienne n’est pas la calligraphie. Ce sont deux choses distinctes, différentes. Mais pour un Chinois, l’écriture courante présente déjà des points communs avec la calligraphie kaishu et xingshu. Je pense que quand le stylo et le pinceau sillonnent le papier, l’auteur exprime ses sentiments et ses émotions, ceux-ci déterminent la physionomie et le souffle de ses tracés que ce soit au stylo ou au pinceau.
J’ai créé mon style et il lui a fallu plus de 15 ans pour être vraiment reconnu comme tel. Au départ, ce n’était pas du tout mon Maître qui m’y avait amené.

M. S-G : Peut-on dire que tu l'as fait sous sa sage conduite ? ou que tu l'as fait beaucoup plus tard ?

 S. B : Créer un style calligraphique reconnu comme tel est un long parcours . Qu’est-ce que le style calligraphique personnel ( 人书体 ) ? Pour répondre à cette question, il faut avant tout savoir comment un jeune Chinois apprend la calligraphie.

Cet apprentissage consiste en grande partie en la copie répétée des maîtres. 

Au départ, on a un professeur qui explique aux élèves comment prendre correctement le pinceau, préparer l’encre, et respirer avec le pinceau. 

Mon premier Maître était décorateur en chef de la municipalité de Shanghaï. Il était exigeant mais très patient et gentil. Il m’expliquait avant tout comment se tenir debout ou assis devant le pinceau, et comment diriger l’esprit vers le vide (concentration). Et puis, il traçait patiemment des traits et des mots que je copiais, copiais, dix fois, cent fois, le même geste jusqu’à son hochement de tête de bas en haut et le petit sourire au coin de ses lèvres. A ce moment-là, sa main gauche se posait sur ma petite tête et caressait mes cheveux bien noirs. Je sentais son énergie douce parcourir mon corps.

De cinq à quatorze ans (j’ai oublié exactement combien d’années), tous les matins, je répétais ces gestes sous le guide de son pinceau, du kaishu 楷书au caoshu 草书 en passant par zhuanshu 篆书et xingshu行书. A cette époque-là, je ne faisais qu’imiter mon maître, tout en cherchant à ce que ma calligraphie ressemble au plus près possible à la sienne. J’étais un bon copiste. J’ai reçu beaucoup de caresses de sa main gauche sur ma tête.

Et puis, mon Maître , souffrant d’une maladie aiguë, m’a quitté brusquement. Je me souviens aujourd’hui encore qu’un jour avant la fin de sa vie, mon père m’accompagna à son chevet à l’hôpital, le vieux lettré me salua avec un léger sourire fatigué, posant sa main gauche sur ma petite tête, me murmurant péniblement :
« Mon petit, tu as fait un bon départ avec moi, maintenant tu peux copier Wang Xizhi 王羲之 , Zhao Mengfu赵孟頫 ; Yan Zhenqing 真卿 ; Zheng Banqiao 郑板桥, Wen Zhengming 文征明, Tang Yin 唐寅 et autres grands maîtres historiques ». Je lui promis de respecter ses instructions.

En effet, j’ai été fidèle à ma promesse pendant de longues années. 
J’ai passé une quinzaine d’années à copier et copier ces grands maîtres. Et au fur et à mesure, l’envie de m’exprimer à travers le pinceau se faisait naturellement sentir, cette envie devenait de plus en plus forte, irrésistible et à ce moment-là j’arrivai à calligraphier librement et joyeusement , comme je sentais et je voulais,. C’est ainsi qu’est né mon style « Bambou gracieux ». C’ est en fait un sacré mélange de tout ce que j’ai appris auprès de mes nombreux maîtres. 
(A SUIVRE)